Description
Saint-Louis
« Face à face, à quarante-quatre de l'arrivée. Le Suisse et le Belge. »
J'ai entendu cela depuis la cuisine, alors que je préparais une paella avec mon ami Juan, le dimanche 4 avril 2010. Je ne connaissais pas encore le café de spécialité. Je ne savais pas non plus que onze ans plus tard, ce moment resterait aussi vif dans ma mémoire.
Pour citer un dicton classique : « Un événement marquant est un événement qui marque de manière significative l’avenir. » Et Boonen et Cancellara sur le Kapelmuur sont des événements marquants. Et pas seulement dans le cyclisme.
Talent et physique. L'humain et le divin. Ces deux cyclistes auraient pu être Coppi et Bartali, ou Merckx et De Vlaeminck, Hector et Achille, ou Lennon et McCartney. Le Suisse, un athlète déterminé. Le Belge, pas vraiment. Un homme et un dieu (à vous de choisir). Deux légendes qui étaient toutes deux les meilleures de leur génération, malgré leur coïncidence temporelle.
Le cyclisme n'est pas seulement un sport. C'est un rappel constant de l'humanité. Le temps, la vie ou le café nous fileraient entre les doigts sans ces instants de gloire. Les étapes importantes nous rappellent non seulement de grandes choses, mais nous montrent aussi un chemin : l'excellence, la beauté. Le divin.
Dans certaines régions du monde, la culture du café était une responsabilité envers le paysage bien avant que le débat sur la durabilité ne commence. À El Líbano, dans le Tolima (Colombie), c'est le cas. Cette région, depuis le début du XXe siècle, est marquée par une pensée libre et anticléricale. Révolutionnaire. En 1929, les producteurs de café eux-mêmes – les bolcheviks du Liban – lancèrent un mouvement pour reprendre le contrôle de leurs cultures, s'opposant au plan national imposé depuis Bogotá. Le coup d'État ne dura que deux jours. Les survivants se retirèrent dans les zones les plus inhospitalières et furent utilisés comme main-d'œuvre bon marché.
Près d'un siècle plus tard, les petits-enfants de ces intellectuels d'Antioquia gèrent les plantations de café de la région de Tolima. Omar Arango a abandonné sa carrière d'ingénieur système pour retourner sur les terres abandonnées par ses grands-parents, avec deux objectifs en tête : l'excellence et la durabilité. Vingt-cinq ans plus tard, le café cultivé à San Luis est l'un des plus primés de Colombie.
Ce Gesha (une variété importée du Panama) est l'un de ces cafés. Un café qu'un producteur et un torréfacteur cultivent. C'est le café que vous aimeriez servir dans votre café, et c'est certainement l'un de ces cafés qui vous rappellent pourquoi vous aimez tant le café.
Le processus, appelé miel rouge, implique la fermentation anaérobie des meilleures cerises à leur point optimal de maturité pendant trente-six heures dans des sacs GainPro, qui sont ensuite séchées sur des lits africains.
Le résultat est un café très pur, doux et soyeux. Délicat, floral, aux notes de jasmin et de fruits, avec une prédominance de litchi.
Spartacus et Tommeke sont entrés ensemble au Mur, un mythe, et en sont ressortis séparément, telles deux légendes. Dans quelques années, nous nous souviendrons de ce café exquis, tout comme de ce moment tendu sur le Mur de Grammont. Avec un nœud au ventre. Et de la nostalgie.